JULIEN - LE FAIR
"Ce n’est pas parce qu’un artiste a un label, un éditeur, un tourneur et un manager qu’il est arrivé…"
Il souffle un vent de nouveauté sur le FAIR, le dispositif le plus prestigieux et le plus recherché par tous les groupes en développement, véritable sceau de qualité si ce n'est garantie de succès si l'on considère les glorieux ainés comme NTM, Les Têtes Raides, IAM, Katerine, Miossec, Mathieu Boogaerts, Moriarty, Pony Pony Run Run, Lilly Wood & The Prick, Skip The Use ou encore La Femme (la liste est vraiment trop longue). La nouveauté a deux facettes, la première étant la possibilité de s'inscrire pour la sélection 2015 encore pendant un gros mois, la deuxième étant la nomination récente à la tête du dispositif de Julien Soulié, qui nous parle ici de son nouveau métier.
(c) Frank Loriou
Salut Julien, peux-tu te présenter pour nos lecteurs ?
Julien Soulié 35 ans. Dans la musique depuis 2002. J’ai fondé la Familia (structure de management et de production : Alexis HK, Florent Marchet, Robin Leduc, Nach) en 2007 et je suis depuis 4 mois au Fair, le Fond d’Action et d’Initiative Rock.
Peux-tu nous décrire brièvement le FAIR et la fonction que tu y occupes ?
Le FAIR est le 1er dispositif de soutien au démarrage de carrière et à la professionnalisation en musiques actuelles depuis 1989. C’est une Asso loi 1901 créée par le ministère de la culture et financée par ce dernier et par la Sacem, le FCM, le CNV, la SCPP, la SPPF et l’adami.
Je remplace Claude Guyot au poste de direction. Nous sommes une équipe de 4 personnes : Marion à l’administration, Julie à la com et Fred touche à tout ce qui est évènementiel, international et RP.
Que gagne un artiste sélectionné, et combien de temps dure cet accompagnement ?
Nous avons 4 axes d’accompagnement au sein du dispositif :
- une bourse pouvant aller jusqu’à 6.000 euros
- une aide en Com avec nos partenaires : Les Inrocks, France 4, Oui FM, la Férarock, Libération, Deezer, Rue89.com, la Fnac, Ricard SA Music Live…
- un volet Formation : théorique et pratique (cours de chants, de MAO…)
- un accompagnement en stratégie et en management (quand cela est utile et pertinent)
Tout cela, c’est aujourd’hui. Pour demain, nous mettons en place des partenariats avec des festivals pour aider à la diffusion de nos lauréats : Chorus des Hauts de Seine, le Rock dans tous ses états, le Nancy Jazz Pulsations, le festival OUI FM…
Une soirée pour annoncer les nouveaux lauréats avec un parrain, un ancien lauréat du Fair, en octobre prochain. Un séminaire de création pour les lauréats à la Cartonnerie à Reims (printemps 2015). Et on essaie d’améliorer toujours et encore le dispositif !
Après plusieurs expériences plus ou moins liées au secteur musical, tu crées en 2007 comme tu nous le disais La Familia, une structure de management s'occupant notamment d'Alexis HK ou de Florent Marchet. Quels enseignements tires-tu de cette aventure pour aborder la direction du FAIR ?
Il y a aussi Robin Leduc et Nach, j’insiste ;-)
Cela m’a permis d’apprendre beaucoup de choses et de travailler avec tous les métiers de l’industrie de la musique : producteurs, éditeurs, tourneurs, attachés de presse… et de savoir qu’il faut construire avec le temps, chose de plus en plus difficile à faire aujourd’hui… Tout cela m’a permis aussi d’avoir le poste au Fair et de maintenant partager en toute humilité ce savoir et ce savoir-faire : l’intérêt général est un sujet qui me parle vraiment. Alors je pense être à ma place ici.
Vas-tu continuer à jongler avec ces différentes casquettes ?
Je suis en CDI au Fair à plein temps. Je me suis donc organisé pour que la Familia continue de tourner sans moi. Pas évident au début, mais tout le monde prend ses marques !
En tant que boss du FAIR, tu récupères un bébé de 25 ans élevé jusqu'à présent par une seule personne, Claude Guyot, n'est-il pas intimidant de tenir les rênes d'une telle institution ?
Un peu. C’est surtout difficile d’arriver avec un plus petit réseau qu’elle ! Tout le monde connaît Claude et elle connaît tout le monde… mais après, on va construire un fair un peu différemment. Tout ce qui a été fait a été bien fait, alors on le garde ! Mais on va, avec l’équipe, essayer de mettre une autre patte, un autre regard sur ce que doit être l’accompagnement de carrière en 2014.
Après quelques mois d'exercice, quels sont les meilleurs et les pires aspects de cette prestigieuse fonction ?
Le + : c’est d’avoir une équipe sur laquelle s’appuyer et qui est là depuis 3 à 5 ans. Donc on travaille dans la continuité tout en faisant évoluer le dispositif. Le pied.
Le - : je manque un peu de temps pour ma famille…
Le FAIR a pour ambition le "soutien au démarrage de carrière et de professionnalisation en musiques actuelles". En ce qui concerne la sélection 2014, en quoi des groupes comme Fauve, Benjamin Clementine ou Superpoze, qui sont déjà largement encadrés professionnellement, rentrent dans ce cadre ?
Nous y voilà ;-) Nous sommes un dispositif, pas un tremplin ou un prix. On a un comité artistique de 15 personnes (éditeurs, producteurs, salles, festivals, medias, manager, tourneur…) qui change CHAQUE année. Il y a donc eu 377 artistes lauréats pour 377 personnes dans le comité artistique. Donc on est vraiment « neutre », le jury vote par coup de cœur. Après, nous, on travaille la sélection. Et que les artistes soient connus ou moins connus, ils ont tous besoin d’accompagnement extérieur aux partenaires. Les 3 que vous citez n’étaient pas inscrits à l’ADAMI par exemple…
Gabriel, Superpoze, a aimé connaître et comprendre la fiscalité d’un Auteur/compositeur en France.
Avec FAUVE ≠, qui sont producteurs de leurs EP et LP, on parle inscription à la SPPF, dépôt des titres pour les droits voisins, codes ISRC, recherches de subventions et compagnie… ils n’ont pas de management, donc on parle aussi merchandising, machine TPE, et repos !…
Bref, les partenaires des artistes ont souvent le nez dans le guidon (je parle en connaissance de cause) et des choses évidentes (comme l’inscription à l’adami ou à la spedidam) ne sont pas faites.
On apporte un autre cadre. On priorise des choses qui ne le sont pas forcement pour les partenaires, mais qui le sont pour les artistes !
De façon plus frontale, que réponds-tu à ceux qui pensent que pour faire partie du FAIR il faut "déjà être connu" ?
On est dans un dispositif avec 15 lauréats par an. Est ce que Mein Sohn William ou Mermonte sont connus de tous ? pas sur…Donc non, il ne faut pas déjà être connu. Une donnée qui a changé sur les 10 dernières années, c’est que les artistes sont très entourés très tôt. Cela aussi est dû au fait qu’il y a de plus en plus de micro structures qui font du bon boulot. Donc oui, aujourd’hui les lauréats sont souvent identifiés par les pros. Le rôle du Fair de trouver des partenaires est donc moins présent mais existe encore. Et ce n’est pas parce qu’un artiste à un label, un éditeur, un tourneur et un manager qu’il est arrivé…
Avec le recul sur des candidatures vieilles de 25 ans, ne penses-tu pas que les postulants au FAIR 2015 sont bien plus sensibilisés aux ficelles du métier qu'en 90 ? Si oui qu'est ce que cela change dans vos prérogatives ?
Oui les artistes sont presque obligés aujourd’hui d’avoir un œil sur l’aspect « business » ce qui n’était pas forcément le cas dans les 90’s. Mais il faut aussi comprendre les mécaniques. Les ficelles c’est bien, les mécaniques c’est mieux ! et donc, nous accentuons le volet formation dans notre dispositif.
Le FAIR lance un nouveau site et un nouvel appel à candidatures pour 2015, qui choisit et est ce que coucher avec toi favorise une éventuelle sélection ? Si pas, que conseilles-tu à tous les groupes qui veulent toucher le graal et faire partie des heureux élus en 2015 ?
Faire de la bonne musique pour retenir l’attention du jury ! Et rentrer dans les critères de sélection disponibles sur www.lefair.org
Comment vois-tu évoluer le FAIR dans les années à venir ?
Rester le 1er dispositif d’accompagnement et de professionnalisation en Musiques Actuelles en le faisant évoluer avec son temps et avec les problématiques des Artistes d’aujourd’hui.
Aurais-tu une anecdote particulière liée à ton métier à nous faire partager ?
En 2002, quand je suis arrivé sur Paris et que j’étais stagiaire chez Labels, j’écrivais Batofar en deux mots Bateau et phare : et une nana de la promo m’a demandé ce que je faisais dans la musique, que ce n’était peut être pas pour moi… aujourd’hui j’en rigole ;-)
Question anti-corporate, quel est le groupe qui selon toi aurait absolument mérité de figurer dans une précédente sélection du FAIR ?
15 par an… donc forcément il y a des manques… je dirai RONE en Electro. C’est un gars adorable, qui a un talent fou et qui est bien entouré. J’aurai bien aimé partager un bout de chemin avec lui sur son projet ! Mais aussi Robin Leduc (bien sur !), Nasser, Jeanne Cherhal…
Et pour finir, tes dernières claques musicales, album et live ?
En Album : Bambi Galaxy de Florent Marchet ? J’ai le droit ? mais vraiment, il m’a épaté par la direction prise et par la proposition artistique. Sinon, le nouveau François and the Atlas mountain est Top, le EP de Concorde aussi déchire tout avec un superbe clip sur le titre Sons.
En Live : Chassol et son projet INDIAMORE aux bouffes du nord. Magique.
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